Stéphane traverse 2 fois l’hexagone lors de la Race Across France

Stéphane, c’est notre baroudeur de l’extrême. Après l’Ultr’Averne l’année dernière où il gravissait les sommets auvergnats dans une boucle de 800km en 3 jours, il s’est lancé sur une course encore plus folle : la Race Across France ! Créé par Arnaud Manzanini (podcast Ultra Talk et Dans la tête d’un cycliste), cette course relie Lille à Mandelieu en passant par Anglet (trop facile sinon ! ). La RAF, c’est 2600km, 7 cols officiels, 31 000m de D+, en semie-autonomie et à terminer en maximum 10 jours. Une épreuve d’ultra distance qui n’a pas fait peur à notre réparateur vélo préféré, il nous dit tout…

Salut Stéphane, comment ça va après ce périple ?

Salut ! Et bien ça va, mis à part un petit souci de tendon d’Achille qui m’éloigne de mon vélo, mes baskets et mon maillot de bain depuis l’arrivée, la récup se passe bien… difficile d’en faire trop en ne faisant rien en même temps !


Dis nous tout, c’est quoi la Race Across France ?

C’est une course d’ultra-distance à vélo en semi-autonomie, c’est à dire que sur le tracé nous avions six bases de vie (ravitaillement/dortoir/douche) reparties sur le parcours. En dehors de ces lieux, chacun est en autonomie complète : pas de véhicule suiveur, pas de bénévoles aux intersections, les routes sont ouvertes et sans balisage, et comme en triathlon, drafting interdit puisque c’est une épreuve individuelle en contre la montre.

Le parcours est mis à disposition sous la forme d’une trace GPS à suivre, un tracker nous est distribué juste avant le départ pour que l’organisation, et nos supporters, puissent nous suivre et vérifier que le parcours est bien effectué dans sa totalité, si l’on sort de la trace pour aller chercher un point de ravitaillement, un camping ou un hôtel, il faut impérativement reprendre le parcours à l’endroit où on l’a quitté.

Le parcours cette année était de 2600 Kilomètres pour environ 31 000 mètres de dénivelé positif. Le départ s’est fait de Lille en direction du Sud pour aller chercher une première base de vie en Seine et Marne, puis nous contournons bien soigneusement Moulins pour aller à Gueugnon pour la seconde base vie.

Le troisième checkpoint est à Anglet au Pays Basque soit une diagonale de 800kms qui débute par la traversée du Massif Central. Une fois la traversée verticale faite, il est temps de prendre vers l’Est pour affronter quelques cols pyrénéens avant de rejoindre une base à Bagneres de Bigorre au pied du Tourmalet puis à Pezenas dans l’Herault.

Les 500 derniers kilomètres contiennent l’ascension du Mont Ventoux avant un peu de repos à Sault puis une ballade dans l’arrière pays du Sud-Est (via une portion du 70.3 d’Aix en Provence que j’ai reconnu du coup). La traversée des gorges du Verdon nous emmène à Mandelieu la Napoule (après une dernière ascension au Tanneron) qui est la ville d’arrivée. Pour figurer parmi les finishers « officiels » il faut rallier l’arrivée en moins de 10jours.


Qu’est ce qui t’a donné envie de faire cette course ?

Le parcours ! Quand il est sorti en fin d’année dernière j’ai trouvé le tracé sympa pour plusieurs raisons :

  • Elle passait par deux régions familières que j’aime beaucoup : le Pays Basque, surtout qu’à l’origine il était prévu que le premier col basque soit également le premier col que j’ai gravi en vélo et pour finir les gorges du Verdon que je n’avais pas eu l’occasion d’arpenter dans ce sens en vélo.
  • Autre région que je connais bien que nous traversions : l’Auvergne ! D’après les premières indications je pensais même passer par la maison ! Finalement, la traversée en terrain connu n’a pas été une mince affaire !
  • Et enfin, la grande majorité du parcours m’était totalement inconnue, c’était donc une belle occasion de découvrir notre beau pays à vélo !

Comment t’aies-tu préparé mentalement et physiquement ?

Physiquement, ce n’est pas très compliqué, j’ai fait beaucoup de vélo ! Pas autant que je l’avais planifié puisque, comme tout le monde, la météo ne m’a pas aidé, je n’aime pas rouler sous la pluie… Pourtant ça aurait été bénéfique de s’habituer puisque les premiers 650 Kilomètres se sont fait sous l’eau ! J’ai également donné la priorité à d’autres choses que la prépa, notamment le boulot. Globalement l’hiver a été dédié à une prépa assez corsée principalement sur Home Trainer pour travailler sur les qualités physiologiques puis à partir du printemps c’était plus orienté vers du spécifique, donc de l’endurance avec moins d’intensité. En gros, j’ai accumulé un peu moins de 7000 Kms entre Décembre et Mi-Juin (la moitié en intérieur).

Le vélo prend du temps bien sûr mais la logistique est elle aussi très importante. Depuis l’inscription, c’est une réflexion quasi constante sur l’équipement, le vélo et ses différents composants (pneus, développements, position, selle), le matériel à emmener suivant les conditions météo, comment transporter tout cela, de quoi ai-je besoin ou qu’est-ce qui est superflu ? Est-il utile de couper le manche de ma brosse à dents (Oui ! Bien sûr !). Ensuite quand approche le départ et que toutes ces questions reviennent encore et encore en tête il faut ajouter la préparation de la trace ! Nous avons le tracé à disposition mais il faut étudier (enfin quand on essaie de se rassurer) le parcours pour repérer les points de ravitaillements possibles (Supérette, Boulangeries, Cimetière…), les endroits où l’on ne trouvera pas grand chose et qui doivent donc être anticipés (Coucou le Cantal le dimanche après midi…), bref on ne s’ennuie pas quand on est pas sur le vélo, d’ailleurs on y pense aussi quand on est sur le vélo.


Tu avais déjà fait des courses comme ça ?

J’ai mis un orteil là dedans en 2021 en participant à cette même course, mais sur un parcours différent, en équipe de 4. Nous habitions un van lors de l’expérience et nous progressions sous forme de relais, ce qui représentait pour moi environ 130Kms par jours il me semble, l’aventure humaine a été plus mouvementée que la partie sportive ! A l’arrivée en discutant avec Arnaud Manzanini l’organisateur, il nous avait dit que c’était une course totalement différente en solo sans assistance, et je l’ai cru tout de suite !

L’année suivante, l’équipe était reformée puisque l’un de nous se lançait sur un 1000 avec assistance. Puis après j’ai commencé à faire quelques sorties très longues, je me suis organisé un petit tour des Alpes en solitaire histoire de voir ce que ça donnait.

En 2023 j’ai participé à mon premier ultra en solo, l’Ultr’Arverne. C’est une course de 780Kms qui fait le tour de l’Auvergne, j’ai adoré l’expérience et j’avais donc envie de recommencer… je ne pensais pas me lancer sur 2500K pour autant !


C’est quoi ton état d’esprit d’avant course ?

Un peu comme pour un objectif en triathlon, tu te poses des questions sur l’état physique, la température de l’eau, ce qu’il y aura aux ravitaillements, comment je m’habille… par contre on ajoute une grosse portion matérielle puisque la check-list du matériel est beaucoup plus conséquente !

J’étais assez confiant que physiquement ça irait mais préoccupé de savoir si j’avais bien prévu tout le nécessaire.


Et une fois sur place et sur le vélo, comment tu te sens ? Tu penses à quoi ?

La veille de course a été bien stressante, se rendre en train jusqu’au départ, c’est déjà une aventure! Patienter du matin jusqu’à l’heure du départ (22h19’30) en se demandant si j’en emmène pas un peu trop, ou pas assez finalement !

Heureusement c’est aussi l’occasion de discuter un peu avec quelques participants et se rendre compte qu’on est pas seul à se poser des questions !

Comme le départ se fait en contre la montre et que je suis plutôt vers la fin je vois la salle se vider petit à petit, l’ambiance est assez spéciale, tout le monde se souhaite bonne course avec un mélange d’excitation et d’appréhension. Vient le moment de monter sur la rampe de départ et puis c’est parti !

Sur le vélo ? Ma course a duré un tout petit peu plus de 9 jours donc on pense à peu près à tout et on passe vraiment par tous les états possibles !

Sur le long on dit que quand on se sent pas bien ça ne vas pas durer et quand on se sent bien, c’est pareil ! Les deux premiers jours ont été rendus difficiles par la météo, deux jours de pluie battante. La venue de Lionel, Sylvain et Karim sur le bord de la route a fait du bien au moral. Arrivé à Gueugnon il ne restait plus beaucoup de pluie à venir mais d’autres difficultés démarraient.

Pour commencer une douleur au tendon d’Achille est apparue, après un premier essai en baissant ma selle qui soulage un peu je me dis que cela allait passer et j’attaque la route pour aller un peu plus loin que Vichy pour trouver un endroit pour bivouaquer… je ne m’étais pas entraîné à faire cela et du coup l’arrêt n’a servi à rien puisque j’ai pris froid et je n’ai pas dormi. En repartant, le tendon d’Achille fait des siennes et je passe une grosse demie journée à galérer pour avancer dans le Massif Central. Les nuits suivantes seront sur les bases vie ou à l’hôtel, ce qui rendra le repos au moins efficace !

Un ancien du Trimay est venu à ma rencontre du coté d’Ytrac puisqu’il habite maintenant par là bas, c’était sympa de se revoir à cette occasion !

Une fois que le moral revient et que l’on réalise un peu le chemin parcouru c’est assez grisant de se dire qu’on traverse tous ces endroits, et une fois en terrain inconnu c’est plus facile d’apprécier les paysages magnifiques que nous traversons !

Comme le relief, le moral fait le yoyo en fonction du sommeil, des bonbons qu’on trouve dans la supérette, de la gestion de la douleur au tendon, des gens avec qui on discute et qui nous encouragent, de la pluie, de la présence d’une petite auberge salvatrice au pied d’un col attaqué à cours d’eau dans les bidons, de la chaleur, des parents qui viennent faire coucou sur le chemin, du vent et de la course de côte qui s’organise dans le dernier col juste avant l’arrivée avec un autre concurrent qui aura été d’un grand soutien au fil des jours lorsqu’on se croisait.


C’est quoi le plus beau moment de la course ?

La bière à l’arrivée !!! ah ben non il n’y en avait plus, ça m’apprendra à me trainer !

Visuellement le plus beau moment a été lorsque j’ai passé le premier col du Pays Basque. Après une longue journée démarrée à minuit et demi du côté d’Agen, j’ai attaqué cette montée un peu avant la tombée de la nuit, à quelques kilomètres du sommet j’ai pu admirer le soleil qui se couchait sur les Pyrénées et une fois arrivé là haut dans le noir quasi complet, je suis tombé sur les pottoks et les vaches en liberté !


Un moment difficile mais où tu as beaucoup appris ?

J’ai eu une bonne dose de moments difficiles, à Bagneres de Bigorre cela a été compliqué de se remettre en route car mon tendon me faisait vraiment mal et je m’inquiétais de faire de gros dégâts mais je ne voulais pas arrêter alors qu’il ne restait plus « que » 700 kilomètres ou un peu plus… le rapport au temps et aux distances parcourues change énormément !


Est-ce que tu recommanderais à quelqu’un de faire cette course ?

C’est une belle épreuve alors si c’est une expérience qui vous tente, foncez ! Il existe aussi d’autres formats plus petits qui permettent déjà de se lancer sur 2 ou 3 jours.


Et maintenant, what’s next ?

À court terme des voyages à vélo avec de vrais arrêts et à plus longs termes probablement d’autres épreuves du même genre mais peut-être plus courtes et en essayant de corriger les erreurs pour avancer plus rapidement cette fois !

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